Le 19/02/2013 au Centre de santé de Gomponsom (district sanitaire de Yako)
COMMENT EST NÉ LE PROJET TREATFOOD ?
Un besoin d’amélioration du traitement de la malnutrition aiguë modérée (MAM) a été identifié au retour de mission d’un docteur de MSF-Danemark qui a de suite contacté l’Université de Copenhague pour discuter la possibilité d’une collaboration sur un projet de recherche sur la MAM.
La MAM est un problème de santé publique majeur et pendant 30 ans, ce sont des produits « CSB standards » (CSB = mélange de farines de maïs et de soja) qui ont été distribués. Un produit qui n’est pas très bien adapté aux besoins des enfants atteints de MAM. Ce n’est qu’en 2008, lors d’une réunion de l’Organisation Mondiale de la Santé , que des discussions sur le traitement de la MAM et une réelle volonté d’amélioration des produits utilisés est apparue. Le Programme Alimentaire Mondial a alors développé le CSB + (destiné aux enfants de plus de 24 mois et aux femmes enceintes) et le CSB ++ (destiné aux enfants de 6 mois à 24 mois). Des suppléments nutritionnels à base de lipides (LNS), utilisés dans le traitement de la malnutrition aiguë sévère (MAS), ont également été déclinés pour le traitement de la MAM (le « Plumpy nut » par exemple). Mais il n’y a actuellement pas de consensus sur le meilleur produit et plus de recherches sont nécessaires avant que des directives internationales soient développées sur le traitement de la MAM.
Depuis 2008, plusieurs organisations testent de nouveaux produits. Ainsi, des études plutôt focalisées sur l’anthropométrie (avec la prise de mesures standards : poids, taille et périmètre brachial) ont été réalisées. L’originalité du projet TreatFOOD repose sur le fait que la prise de ces mesures est complétée par des recherches sur la composition corporelle, l’activité physique, l’impact de la malnutrition sur le bien-être et le développement des enfants ainsi que sur d’autres indicateurs biologiques. A notre connaissance, aucune autre étude n’a étudié avec autant de détails l’impact des aliments supplémentaires sur le statut nutritionnel et bien-être des enfants comme le projet TreatFOOD est en train de le faire.
POURQUOI AVOIR CHOISI LE BURKINA FASO COMME PAYS D’ÉTUDE ?
Lors de notre rencontre avec l’ONG ALIMA nous avions estimé que leur expertise sur la thématique de la malnutrition était intéressante.. ALIMA est également intéressée par la recherche opérationnelle d’où la mise en place d’un partenariat sur ce projet de recherche innovant. L’ouverture de la mission ALIMA au Burkina Faso était l’occasion parfaite de lancer le projet TreatFOOD dans ce pays.
QUELS SONT LES OBJECTIFS ATTENDUS DU PROJET ?
Les 12 produits (6 CSB et 6 LNS) qui sont testés ressemblent aux produits qui existent déjà (CSB++ et Plumpy Sup) mais leur composition est nouvelle. Ils ont tous la même composition en micronutriments mais ils comportent des quantités de lait et deux qualités de soja différentes. S’il est acquis que le lait est important pour la croissance des enfants, il est aussi très cher et on ne connaît pas la quantité de lait qu’il faut dans les aliments pour obtenir les meilleurs résultats. L’idée est donc de voir si, en ajoutant moins de lait dans les produits, ils ont le même effet sur la récupération nutritionnelle de l’enfant et si l’utilisation d’un soja de bonne qualité peut en partie remplacer le lait.
L’objectif est non seulement de trouver des produits qui donnent de bons résultats mais aussi des produits moins chers que ceux utilisés actuellement. Réduire la quantité de lait entrainera aussi une réduction du prix de ces aliments. A la fin de l’étude, un « classement » des 12 produits utilisés sera fait, présentant leur efficacité sur la récupération nutritionnelle, le bien-être et le développement des enfants souffrant de MAM et pas seulement sur les critères poids et taille. Une analyse cout-efficacité sera aussi effectuée.
QUEL SERA LE DÉROULEMENT DE LA PHASE D’ÉTUDE ?
5 centres de santé du district sanitaire de Yako sont concernés par la phase d’étude qui commencera mi 2013. Le centre de santé de Gomponsom qui accueille actuellement la phase pilote et 4 autres.
Le suivi de 1.600 enfants est prévu. Le projet se déroulera sur 12 mois, 6 mois pour recruter les enfants et 6 mois pour les prendre en charge.
QUELLES SONT LES RETOMBÉES ATTENDUES ?
Des publications réalisées par l’équipe TreatFOOD et les 5 étudiants en charge de l’étude seront diffusées dans des revues techniques une fois l’étude terminée. Chaque étudiant aura la charge de rédiger 3 articles sur différents thèmes. En effet, le projet TreatFOOD n’est pas qu’une étude, il a aussi pour objectif un renforcement des compétences locales sur la recherche et la nutrition c’est pourquoi deux des étudiants sont burkinabés et réalisent un doctorat.
COMMENT S’EST DÉROULÉE LA PHASE PILOTE ?
La phase pilote, d’une durée de 5 semaines, a permis de tester les méthodes, les équipements, les différentes activités mais aussi l’acceptabilité de certaines techniques. En effet, il était nécessaire de voir si certaines techniques utilisées, étaient bien acceptées au Burkina Faso. C’était le cas notamment pour deux nouvelles mesures anthropométriques à réaliser (la mesure du pli cutané et la distance genou talon) ; pour l’utilisation du deutérium, qui sert à calculer la masse maigre ; pour le prélèvement d’échantillons de salive ; pour l’utilisation de l’accéléromètre qui sert à mesurer l’activité physique des enfants, pour les nouveaux aliments proposés et pour la grille utilisée pour évaluer le développement des enfants.
La bonne nouvelle est que toutes ces techniques sont bien acceptées par les mères des enfants et par les enfants.
4 phases principales de la phase pilote peuvent être identifiées :
1ère phase : 60 enfants ne souffrant pas de malnutrition ont été accueillis pour les tests.
2ème phase : une quarantaine d’enfants souffrant de MAM ont été accueillis pour tester plus particulièrement les techniques d’administration du deutérium. En effet, le temps d’attente entre l’administration et le prélèvement de salive varie entre un enfant malnutri et un enfant en bonne santé. Le temps nécessaire de dissolution du deutérium dans l’organisme va être évalué et adapté pour la phase étude (entre 3 et 5 heures).
3ème phase : l’équipe en charge de l’acceptabilité réalise des visites directement dans les villages pour tester l’acceptabilité des aliments supplémentaires. Ces visites concernent 120 enfants.
Une fois la phase pilote terminée, il restera à analyser les résultats, à adapter le protocole, à identifier et préparer les sites pour le lancement de la phase d’étude. Les collègues burkinabés prendront le relais sur cette phase avec un accompagnement à distance.
ES-TU SATISFAITE DE LA FORME QUE PREND LE PROJET ?
Oui, l’équipe est rassurée pour le déroulement de la phase d’étude. La faisabilité est confirmée et les équipes pourront réaliser le travail souhaité.
L’équipe de Yako et Gomponsom est de qualité, il existe une bonne collaboration entre le centre de santé et la population. Toutes les mères sont revenues pour les deuxièmes visites ce qui est très positif. Toutes les conditions sont donc réunies pour que le projet se déroule bien. L’expérience de la phase pilote est rassurante pour la phase d’étude.
Le projet TreatFOOD est financé par DANIDA (Danish International Development Assistance) et MSF.