La situation sécuritaire au Mali se dégrade continuellement. Des milliers de familles abandonnent leurs foyers et leurs terres, fuyant la violence, recherchant des conditions de vie décentes ailleurs dans le pays. En décembre 2023, on comptait près de 355 000 personnes déplacées internes dans l’ensemble du pays1.
Au Mali, des camps de déplacés en pleine capitale
Salimata est l’une d’elles. Elle est arrivée sur le camp de Mabilé en 2019, en plein Bamako, la capitale du pays. « Avant, j’habitais à Kourou », raconte-t-elle. « J’ai dû partir à cause des violences armées ». Cela fait maintenant 5 ans déjà que la jeune maman vit avec ses enfants dans ce camp de la Commune VI, qui était autrefois un lycée.
A Bamako, la capitale, des milliers de personnes en provenance des régions de Mopti, Ségou et Tombouctou se sont installées dans plusieurs camps, notamment dans la Commune VI.
« Le camp a été créé fin 2019. Il était destiné à l’accueil de sinistrés suite à des inondations à Bamako », explique Ramata, gestionnaire du camp. « Au même moment, des violences armées ont éclaté au nord du pays, il fallait alors accueillir une vague de déplacés. Le gouvernement a décidé de les loger dans ce qui était d’abord un lycée. Ce camp est comme un village maintenant : les gens y vivent normalement, fêtent des baptêmes, des mariages… ».
Les enfants, premières victimes de l’extrême vulnérabilité dans les camps de déplacés
Les camps de personnes déplacées internes concentrent, en quelques centaines de mètres carrés, pauvreté et vulnérabilité extrêmes – en décembre 2023, d’après le Rapport sur les mouvements de populations de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), les camps de Bamako accueillaient 3 462 personnes, dont 27,4% d’enfants de moins de cinq ans. Ils sont les lieux des indicateurs rouges, particulièrement affectés par une crise alimentaire et nutritionnelle.
Sur le camp de Mabilé, Adjaratou est infirmière pour ALIMA et son partenaire local AMCP-SP. La majeure partie de son temps est réservée aux jeunes enfants, qui représentent 53,6 % des personnes ici. Elle pèse, mesure les périmètres des maigres bras qu’elle tâtonne. « A notre arrivée, beaucoup d’enfants souffraient de malnutrition dans le camp de Mabilé », explique-t-elle ». « Heureusement la situation a beaucoup évolué. Nous suivons actuellement 136 enfants atteints de malnutrition aiguë, dont une centaine sont sur la voie de la guérison. Nous sommes la seule ONG à prendre en charge la malnutrition [à Mabilé] ».
ALIMA et son partenaire AMCP-SP interviennent dans différents camps de déplacés internes à Bamako depuis novembre 2022. Les équipes renforcent les structures de santé en expertise et en ressources humaines et forment les soignants nationaux pour améliorer la qualité des soins sur le long terme, en particulier pour le traitement de la malnutrition aiguë, du paludisme, mais aussi des violences basées sur le genre.
Ces femmes devenues « mamans lumières » des camps
« Deux de mes enfants ont souffert de malnutrition. J’ai suivi la formation PB-mères, pour savoir comment mesurer le périmètre brachial. », témoigne Altiné, rencontrée sur le site. Savoir mesurer le périmètre brachial d’un enfant permet aux mamans de détecter précocement et depuis chez elles la malnutrition aiguë de leur enfant. « Auparavant, lorsqu’un enfant avait les cheveux roux ou un ventre ballonné, nous pensions qu’il était juste malade. Maintenant, nous savons que ce sont des symptômes de la malnutrition aiguë ».
L’action d’ALIMA et AMCP-SP a un réel impact sur la vie des habitants du site. Les mamans formées à la détection de la malnutrition deviennent des « mamans lumières » : elles forment à leur tour les autres mamans et sensibilisent à la connaissance des symptômes de la malnutrition. « Nous avons beaucoup appris grâce à ALIMA », raconte Altiné. Aujourd’hui, elle fait elle-même partie des « mamans lumières ».
La crise sécuritaire que traverse le Mali continue d’exacerber les vulnérabilités des populations, notamment des déplacés internes. Les besoins humanitaires ne font qu’augmenter, alors que les ressources sont de moins en moins disponibles. Malgré les soins vitaux fournis par ALIMA et AMCP-SP, les déplacés internes se font de plus en plus nombreux et les ressources, de plus en plus rares. Ces populations, parmi les plus vulnérables face aux multiples crises que connaît le Mali, ont plus que jamais besoin d’une assistance humanitaire.
Photo de couverture © Seyba Keita / ALIMA
- d’après le Rapport sur les Mouvements de Population, Organisation internationale pour les migrations (OIM) ↩︎