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Crise en Haïti : ALIMA soigne plus de 15.000 personnes dans les camps de déplacés

Depuis février 2024, la crise sécuritaire en Haïti, particulièrement à Port-au-Prince, s’est intensifiée, forçant des milliers de familles à fuir vers des camps de fortune où les conditions de vie sont extrêmement précaires. Face à cette situation, ALIMA, depuis un an, offre une assistance médicale essentielle aux personnes les plus vulnérables.


Les affrontements armés à Port-au-Prince ont contraint plus d’un million de personnes à fuir, parfois plusieurs fois. 65% de ces déplacements internes sont enregistrés dans la capitale haïtienne (Zone métropolitaine de Port-au-Prince, ZMPP) avec l’apparition d’une vingtaine de nouveaux sites improvisés en moins de deux semaines en novembre dernier.

Face à l’insuffisance des abris provisoires, écoles, institutions publiques et communautés locales se mobilisent pour accueillir ces personnes déplacées et offrir un minimum de stabilité et de sécurité aux personnes les plus vulnérables. Cependant, cette réponse reste fragile dans un pays plongé depuis plusieurs années dans une crise multidimensionnelle, laissant aujourd’hui près de 85 % du territoire de la zone métropolitaine de Port-au-Prince sous le contrôle des groupes criminels organisés, selon les autorités locales.

En 2025, l’insécurité alimentaire atteint un niveau critique en Haïti, touchant 49% de la population, soit environ 5,5 millions de personnes, selon la Coordination nationale de la sécurité alimentaire (CNSA). Les conditions de vie dans les sites de déplacements restent précaires, avec un accès limité à la nourriture, à l’eau potable et aux soins de santé. Parmi les structures sanitaires avec lits dans la ZMPP, seulement 41% sont pleinement fonctionnelles. Selon les autorités locales, les enfants et les femmes sont les plus touchés par cette situation. Les autorités sanitaires signalent même des cas suspects de maladies épidémiques à travers le pays, craignant également la propagation de maladies dans les sites de personnes déplacées.

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Des cliniques mobiles pour garantir l’accès aux soins

Présente sur l’île après le séisme de 2010, jusqu’à 2012, ALIMA a repris ses opérations en Haïti en février 2024, pour soutenir les populations durement touchées par la crise humanitaire, malgré les défis imposés par la violence omniprésente.

ALIMA offre gratuitement des médicaments et déploie trois cliniques mobiles dans 12 sites stratégiques situés dans les communes de Port-au-Prince et de Delmas, et dans cinq quartiers vulnérables de la commune de Cité-Soleil.

Grâce au soutien financier de partenaires tels que ECHO, CDCS et OIM*, les trois cliniques mobiles d’ALIMA ont déjà pris en charge 15.779 personnes (fin janvier 2025), dont 2027 enfants de moins de 5 ans, souvent les plus exposés à l’insécurité alimentaire et aux maladies.

Chaque clinique mobile est composée d’une équipe pluridisciplinaire comprenant un médecin, une infirmière, une sage-femme, un aide soignant, un psychologue et un agent psychosocial, offrant ainsi des services tels que des consultations médicales générales, soins prénatals et postnatals, prise en charge des survivantes de violences sexuelles ainsi qu’un accompagnement psychologique et de santé mentale pour les patients.

« ALIMA est revenue afin apporter son expertise médicale à la population haïtienne. Ainsi, le déploiement de nos cliniques mobiles, dans un contexte de grande volatilité, permet à ALIMA, grâce au soutien de ses partenaires financiers et à son acceptation par les communautés, de rapprocher les soins de la population. Nous facilitons ainsi l’accès à la santé et supportons le ministère de la Santé publique et de la population (MSPP) dans sa volonté de rouvrir les structures sanitaires. »

Virginie Vialas, cheffe de mission d’ALIMA en Haïti
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Une maternité rouvre ses portes grâce à ALIMA

La rareté des services de soins maternels et infantiles dans la région métropolitaine de Port-au-Prince constitue une autre préoccupation majeure. Pour pallier ces lacunes, ALIMA collabore étroitement avec le ministère de la Santé publique et de la population (MSPP) et les hôpitaux encore opérationnels, tels que l’hôpital Fontaine, l’hôpital Eliazar Germain et l’hôpital universitaire La Paix, afin de garantir une prise en charge complète des patients.

Grâce au soutien d’ALIMA, l’une des plus grandes maternités d’Haïti, l’hôpital Isaïe Jeanty (aussi appelé hôpital Chancerelles), a rouvert ses portes le 2 décembre 2024. Cet hôpital avait été fermé le 29 février 2024 à cause de la violence touchant la capitale. Il se trouve à Cité Soleil, une commune de 26 quartiers considérée comme le plus grand bidonville de Port-au-Prince. Avec ses 300 000 habitants, Cité Soleil dispose de peu de structures fonctionnelles. Les rares centres de santé sont des centres privés, obligeant les habitants à payer plus pour accéder aux services de santé.

La réouverture de la maternité est un pas important, surtout pour les femmes enceintes qui pourront accoucher dans de meilleures conditions. Pour soutenir cette reprise, l’équipe d’ALIMA en Haïti a fourni du matériel et des équipements médicaux. Elle a aussi formé le personnel de santé pour améliorer la prise en charge des patientes. Moins de huit jours après sa réouverture, le premier nouveau-né a vu le jour à Chancerelles avec l’assistance du Dr Ousmane, coordinateur médical d’ALIMA en Haïti. Dr Ousmane souligne que cela permettra aux mères et à leurs nouveau-nés d’avoir un meilleur accès aux soins, dans un contexte de crise très difficile.

« Les services de soins de santé maternelle ne sont pas seulement un droit fondamental, mais un pilier essentiel pour bâtir des communautés résilientes. En Haïti, où les défis humanitaires se mêlent à l’urgence médicale, ALIMA s’engage chaque jour à protéger la vie des mères et des nouveau-nés. Des cliniques mobiles aux salles d’accouchement sécurisées, nous agissons pour offrir des soins obstétricaux d’urgence, former les acteurs locaux, et briser le cycle des inégalités. Car chaque femme mérite de vivre une grossesse en sécurité, et chaque enfant doit avoir la chance de grandir. Ensemble, nous transformons l’espoir en action, une naissance à la fois. »

Dr Ousmane, coordinateur médical d’ALIMA en Haïti
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Former les communautés pour une réponse durable

Au cœur de sa stratégie d’intervention d’ALIMA en Haïti se trouve également la formation communautaire, un pilier essentiel pour renforcer les capacités locales et garantir la pérennité des interventions médicales. Les communautés sont les premiers moteurs de leur propre développement. Ainsi, ALIMA implémente des programmes de formation axée sur deux grands piliers :

  • La sensibilisation à la santé publique : diffusion des bonnes pratiques d’hygiène, d’assainissement et de prévention des maladies infectieuses telles que le choléra, le paludisme ou la malnutrition.
  • Formation des agents de santé communautaire : ALIMA forme des volontaires locaux pour détecter les premiers signes de maladies graves, orienter les patients vers les structures de santé et assurer un suivi médical.

Dr. Dupiche Daniel, responsable des activités externes pour ALIMA explique que « ces 30 agents communautaires qui ont bénéficié de ces modules de formation ont été identifiés avec l’accord ministère de la santé publique dans tous nos sites d’intervention. Ils sont trois par zone : un agent de santé, un agent de premier secours psychologique et un leader communautaire. »

En un an, les interventions d’ALIMA ont permis d’apporter des soins vitaux à des milliers de personnes vulnérables, malgré un contexte sécuritaire extrêmement instable. ALIMA entend améliorer les taux de dépistage, réduire la mortalité liée aux maladies et responsabiliser les populations face aux défis sanitaires. En renforçant les compétences locales et en favorisant l’entraide, ces actions contribuent à consolider l’accès aux soins et la résilience des communautés.

 *Les cliniques mobiles d’ALIMA sont financées par ECHO, CDCS, IOM, pendant l’année 2024