Air pollué par les fumées urbaines, déchets contaminés, agents chimiques ou perturbateurs endocriniens, vagues de chaleur, événements météorologiques extrêmes… tous ces phénomènes s’accentuent au rythme de la dégradation de la planète et laissent leur empreinte sur la santé des populations. De plus en plus, nos soignants et ceux de nos partenaires (Ministères de la Santé, ONG locales), rencontrent des patients atteints de ce qu’on appelle des « pathologies environnementales » – certains accidents vasculaires cérébral, cancers, affections respiratoires chroniques comme l’asthme, maladies diarrhéiques, affections néonatales, paludisme, etc. Si environnement et santé sont fortement liés, crise écologique et crises humanitaires le sont aussi.
Les scientifiques ne cessent de tirer la sonnette d’alarme. En 2019 encore, 11 000 chercheurs du monde entier signaient le troisième « avertissement à l’humanité » concernant la crise écologique annoncée. La conclusion du rapport est sans appel : sans changements profonds et durables visant à limiter notre impact écologique, « une souffrance humaine indescriptible » paraît inévitable. Qu’avons-nous fait pour changer la donne ?
L’Afrique subsaharienne particulièrement concernée
La planète entière est affectée et elle le sera de plus en plus. Mais pas partout de la même manière, ni avec la même intensité. La carte des vulnérabilités est très claire : le sous-continent indien et l’Afrique subsaharienne seront les plus impactés. Même dans un scénario positif de respect de l’Accord de Paris*, le Sahel et l’Afrique australe seront confrontés à une hausse supplémentaire d’au moins 2°C d’ici 2050.
Nous l’observons tous les jours dans les pays où nous agissons – en Afrique Subsaharienne -, et le pire reste à venir. Sécheresses et pluies torrentielles promettent d’être encore plus fréquentes, plus intenses, dévastant les cultures, nourrissant des tensions sociales inévitables et provoquant des déplacements de population majeurs. La croissance des besoins de santé et d’assistance humanitaire ne fait aucun doute.
« Le changement climatique va à la fois impacter massivement les besoins humanitaires dans nos zones d’intervention mais aussi nous obliger à repenser notre façon d’intervenir », soutient le Dr Moumouni KINDA, directeur des opérations d’ALIMA. « Nous devons donc, dès maintenant, adopter de bonnes pratiques pour être un acteur responsable. » Une seule trajectoire collective est viable : un développement plus durable, plus résilient et plus équitable en termes de partage des ressources.
ALIMA s’engage
Au même titre que les hôpitaux, les universités ou les collectivités, les ONGs contribuent aux pollutions locales et globales, et donc à leurs impacts humains. Il est temps d’agir.
D’autant que les professionnels humanitaires d’ALIMA, à 95 % Africains, ont un rôle unique à jouer. Proches des populations locales, ils sont les plus à même de témoigner et d’alerter des conséquences de la crise écologique sur les patients. Et de s’engager. Pour ALIMA, l’adoption d’un cadre environnemental s’impose. « Nous devons connaître, suivre et réduire l’empreinte écologique de notre action collective sur le terrain comme au niveau de nos sièges, en transformant radicalement notre manière d’agir, de nous déplacer et de nous approvisionner », affirme Henri Leblanc, directeur général adjoint d’ALIMA. « Penser ensemble action humanitaire d’urgence et urgence environnementale est incontournable. »
La spécificité d’ALIMA, notre localisation au plus près de nos terrains d’intervention – avec notre siège opérationnel à Dakar, Sénégal -, nos équipes régionales, nos partenaires locaux, limite déjà notre empreinte écologique. Mais nous devons aller plus loin encore. Les leçons apprises par la crise de la COVID-19, obligeant à réduire drastiquement les échanges intercontinentaux, doivent être intégrées et pérennisées.
Notre démarche en bref
Solidaires des communautés les plus affectées, nous, équipes d’ALIMA, voulons tendre vers l’exemplarité et nous donnons les objectifs fondamentaux suivants :
– Réduire notre empreinte à la hauteur du diagnostic scientifique ;
– Mettre en œuvre des alternatives durables à nos pratiques les plus nocives ;
– Développer des projets médicaux adaptés pour répondre aux besoins dans le domaine de la santé et de l’environnement ;
– Anticiper la croissance des besoins de santé et l’évolution de leur typologie ;
– Entraîner l’écosystème vers des pratiques opérationnelles durables, notamment en devenant moteur de l’initiative Climate Action Accelerator, qui vise à coaliser plusieurs grandes organisations du secteur de l’aide et à les accompagner pour concrétiser leur réduction d’émissions de CO2 au sein d’une démarche environnementale élargie ;
– Témoigner et plaider depuis l’Afrique des conséquences de la crise écologique, comme dernièrement, en co-signant une Déclaration d’Engagement des organisations humanitaires pour le climat aux côtés de neuf autres organisations membres du Réseau Environnement Humanitaire.
Nous revendiquons désormais notre engagement à travers une démarche environnementale et nous serons redevables de nos progrès devant nos patients et leurs communautés, nos partenaires et le grand public.
*Premier accord mondial sur le climat et le réchauffement climatique adopté en 2015. Il définit un cadre mondial visant à éviter un changement climatique dangereux en limitant le réchauffement de la planète à un niveau nettement inférieur à 2 °C.
Photo de couverture : © Patrick Meinhardt / ALIMA