Située à l’Extrême nord-ouest du Niger, la région de Tillabéri est frontalière du Mali et du Burkina Faso. La zone des trois frontières, telle qu’on l’appelle, fait face à une crise sécuritaire qui dure depuis plusieurs années. En effet, cet espace sahélien, sujet à de régulières incursions de groupes armés non étatiques, est, par ce fait même, le terrain d’intenses opérations militaires. C’est un triangle d’insécurité qui entraîne des déplacements continus de populations. Selon le HCR, au 31 janvier 2024, la région de Tillabéri compte plus de 262 000 personnes déplacées, dont environ 189 000 personnes déplacées internes (le plus grand nombre au Niger) et 42 718 réfugiés, principalement originaires du Mali, et 31 059 demandeurs d’asile, majoritairement en provenance du Burkina Faso. Cet afflux de déplacés donne jour à d’importants besoins humanitaires en abris, eau, hygiène et assainissement (WASH), nourriture, santé et protection. La région fait également face à des maladies à potentiel épidémique telles que la rougeole, la méningite et la diphtérie, dans un contexte où l’accès aux soins reste problématique.
Dans ce cadre où les défis sont nombreux et entremêlés, ALIMA travaille à combler les besoins en soins de santé des communautés autochtones et déplacées. Depuis 2021, les équipes d’ALIMA dans la région ont soigné et pris en charge près de 168 000 patients, réalisant 120 000 consultations,17 000 hospitalisations, 8 200 accouchements, traitant 12 300 cas de malnutrition aiguë sévère, 22 000 consultations prénatales etc.
© Alexandre Bonneau – Afroto / ALIMA
Dix ans de présence dans le Tillabéri
Depuis 2014, le Tillabéri concentre une grande partie des activités d’ALIMA au Niger. Actuellement, deux projets y sont menés. La région est traversée par le fleuve Niger, qui la sépare en deux parties. Notre ONG s’est d’abord installée sur la rive gauche, avant de s’étendre sur la rive droite en 2023.
L’implantation d’ALIMA sur la rive gauche du fleuve Niger a été motivée par l’augmentation de l’insécurité liée aux groupes d’opposition armés, à la criminalité et aux conflits communautaires. Cette région est particulièrement vulnérable et nécessite une intervention humanitaire soutenue pour répondre aux besoins en santé et en nutrition des populations affectées.
Sur la rive gauche, ALIMA couvre les districts sanitaires de Banibangou, Ayorou et Abala. Le bureau principal pour cette zone est situé à Abala, avec des bases et des équipes également présentes à Banibangou et Ayorou.
Quels sont les principaux domaines d’intervention d’ALIMA ?
Les principaux domaines d’intervention d’ALIMA dans le Tillabéri sont la santé et la nutrition. Notre approche à base communautaire de la pyramide sanitaire nous permet de travailler à différents niveaux du secteur de la santé, en intégrant les communautés, les soins de santé primaires (gestion des maladies chroniques, soins palliatifs etc.) et les soins de santé secondaires qui nécessitent une prise en charge plus lourde.
Nous collaborons étroitement avec les communautés locales et le ministère de la Santé. Les activités communautaires jouent un rôle crucial, car elles nous permettent d’atteindre les zones les plus reculées et d’apporter des soins aux plus vulnérables. Nos programmes communautaires incluent l’approche PCIME (Prise en Charge Intégrée des Maladies de l’Enfant) pour traiter les maladies courantes (le paludisme, les infections respiratoires et la diarrhée…), et l’approche PB-Mère, qui offre aux mères des outils pour surveiller l’état nutritionnel de leurs enfants et les engage dans un rôle actif au sein de la communauté.
Au niveau des Centres de santé intégrés, nous prenons en charge des enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère (MAS) et renforçons les capacités locales pour assurer la durabilité des activités à long terme. Nous utilisons également des cliniques mobiles pour atteindre les populations éloignées et fournir des soins essentiels.
Nos projets intègrent également les concepts de WASH in Nut et Health in Nut qui consiste à l’intégration de la mise à disposition d’eau potable pour la boisson, du savon, du lavage des mains, du nettoyage des structures sanitaires, du matériel de collecte et de gestion des déchets ainsi que des aires de déchets pour l’élimination des déchets collectés. Cela nous permet d’assurer une prise en charge holistique des patients. Nous veillons également à la prise en charge des cas de violences basées sur le genre (VBG) et des problèmes de santé mentale, offrant ainsi un soutien complet aux personnes affectées.
© Alexandre Bonneau – Afroto / ALIMA
Quels besoins vient combler l’action d’ALIMA ?
L’action d’ALIMA comble plusieurs besoins cruciaux dans la région, exacerbés par une forte insécurité et des problèmes d’accès. Grâce à notre intervention, les populations peuvent accéder aux premiers soins, au dépistage de la malnutrition et bénéficier de la continuité des soins, laquelle ne serait pas possible autrement.
Par exemple, à Banibangou, où les déplacements sont limités à un rayon de 5 km autour de la ville en raison de l’insécurité, les activités communautaires d’ALIMA permettent de prendre en charge les maladies courantes par l’intermédiaire de relais communautaires. De plus, ALIMA utilise des cliniques mobiles pour offrir un soutien psychologique et une prise en charge médicale des cas de violences basées sur le genre). Ces cliniques mobiles répondent également aux besoins du Mécanisme de réponse rapide (RRM en anglais) en cas de nouvelles urgences humanitaires.
À l’hôpital d’Abala, ALIMA soutient la salle d’urgence, permettant de stabiliser les patients et de les référer si nécessaire. Dans le district sanitaire d’Ayorou, ALIMA intervient à l’hôpital de district, dans les services de Centre de récupération nutritionnelle intensive (CRENI), de pédiatrie, de maternité et de laboratoire. ALIMA couvre également les Centres de santé intégrés (CSI) d’Inatès et d’autres localités, en fournissant des services essentiels.
Le mot de la fin ?
Au vu de la situation sécuritaire, notamment les multiples violences armées enregistrées dans la zone, nous continuerons à faire face aux déplacements forcés des populations dont les besoins humanitaires sont croissants. L’appui des autorités reste essentiel pour faciliter l’accès humanitaire aux communautés vulnérables et assurer le respect des principes humanitaires.
Photo de couverture © Alexandre Bonneau – Afroto / ALIMA