1er Juillet 2016. Nous décidons de mener une mission exploratoire à Monguno. Notre équipe était basée à Maiduguri, la capitale de l’état de Borno. Nous avons entendu que la ville de Monguno avait été sécurisée par l’armée nigériane. Monguno est située à 140 km au Nord de Maiduguri. Comme il s’agit de la dernière ville avant la ligne de front, un grand nombre de populations déplacées des villages du Nord et de l’Est viennent y trouver refuge. Très peu d’informations sont disponibles sur la situation là-bas, aucune organisation internationale n’y étant allée jusqu’à présent. Nous avons donc décidé de partir pour Monguno pour évaluer les besoins médicaux et la possibilité d’envoyer une équipe sur place.
15h. Nous nous mettons en route. La route de Maiduguri à Monguno n’est pas sûre à 100%, mais nous avons entendu qu’elle est encore empruntée. Nous avons eu l’autorisation de voyager sans escorte militaire. Le premier danger a été l’absence de réseau téléphonique GSM sur la route. La route est en relativement bon état, mais nous avons croisé des villages brûlés, des véhicules et chars calcinés. Les traces du conflit sont encore bien présentes dans le paysage.
18h. Nous arrivons à Monguno. A notre arrivée, nous avons vu l’impressionnant dispositif sécuritaire mis en place : la ville est encerclée de tranchées. Une fois dans l’enceinte de la ville, nous avons rapidement rencontré les autorités militaires, puis nous avons rejoint notre base pour la nuit.
Le centre de la mère et de l’enfant ALIMA (Crédits photo : Solidarités International)
5h. Nous commençons à aménager le centre de santé mère-enfant. La rumeur de notre présence se répand très vite dans la ville, et nous sommes rapidement entourés de centaines de déplacés qui réclament des soins. Ali et l’équipe locale du CICR commencent les consultations. Il y a beaucoup de patients, et on est obligés de fermer les portes lorsque la salle d’attente est pleine, pour faire un circuit approprié et un triage des enfants malades. A peine réveillés les infirmiers et médecins ont commencés les consultations.
Premier jour au centre de santé mère-enfant à Monguno
9h. Nous évaluons les besoins en ville. On visite les camps de déplacés et on mesure l’ampleur de l’urgence. J’ai été principalement frappé par le manque d’accès à l’eau. Des files de bidons s’étalent sur des centaines de mètres, et le débit des points d’eau est très faible. Il y a des heures d’attente pour obtenir à peine 20 Litres d’eau. La ville vit au ralenti, ses habitants originels sont partis vers le Sud et les déplacés n’ont pas de revenus pour acheter des vivres. Ils vivent dans des conditions d’extrême précarité et l’hygiène est déplorable. Beaucoup d’enfants sont malnutris et une épidémie de rougeole sévit.
Consultation sur le camp de GG, Monguno, Nigeria
12h. Nous installons des consultations dans le camp de GG. Il s’agit du plus grand camp de déplacés de la ville. Nous fournissons les premiers soins et nous envoyons les enfants dans un état critique au centre de santé mère et enfant. Il y a d’énormes besoins. Les équipes sont débordées. J’ai accompagné une maman du camp GG jusqu’au centre de santé mère et enfants. Elle avait un bébé au dos et un enfant de cinq ans à la main. Son fils de deux ans était dans un état critique, souffrant de déshydratation et de malnutrition sévère. Je l’ai porté jusqu’au centre pour qu’il reçoive des soins.
Mai Mahaman Saley portant un enfant dans un état critique à la clinique
15h. Nous repartons pour Maiduguri. Nous faisons un rapport de notre exploration au plus vite et l’envoyons aux autres organisations internationales. Nous décidons d’envoyer une équipe complète à Monguno. Depuis notre visite, nos équipes continuent de soigner des malades et plusieurs d’autres organismes internationaux se sont également installés dans la ville, notamment le CICR, OCHA, l’Unicef et MSF. L’aide humanitaire se met en place mais les besoins sont toujours énormes.