Ce n’était pas son premier accouchement, mais cette fois-ci il y a eu des complications. Au moment où ses voisins l’ont amenée au centre de santé maternelle et infantile (Mother and Child Health center), elle avait déjà perdu beaucoup de sang. Les médecins ont dû pratiquer une césarienne d’urgence pour sauver sa vie, après qu’elle ait perdu son bébé. Alors qu’on l’emmenait au bloc opératoire, Maimuna nécessitait une transfusion sanguine en urgence.
Heureusement, quelques mois plus tôt, ALIMA(The Alliance for International Medical Action) avait ouvert une banque de sang au centre de santé, où on peut venir donner du sang qui est alors stocké pour les transfusions en cas d’urgence.
“J’étais inconsciente lorsque des voisins m’ont emmené à la clinique d’ALIMA”, se souvient Maimuna. “Ils ont dû m’opérer de toute urgence. J’ai eu besoin de 4 poches de sang. Cela m’a sauvé la vie. Je suis vraiment reconnaissante car aucun montant d’argent n’aurait suffi. Mais il faut que les gens donnent leur sang. ”
Maimuna est l’une des 112 personnes qui ont jusqu’ici bénéficié de la banque de sang, au centre de santé maternelle et infantile soutenu par ALIMA. C’est actuellement l’unique banque de sang de toute la ville de Monguno. qui abrite aujourd’hui plus de 200 000 personnes, dont 130 000 personnes déplacées internes (PDI) forcées de fuir en raison des violences.
“L’un des besoins majeurs au centre de santé maternelle et infantile est de pouvoir disposer d’un stock de sang pour mieux prendre en charge les enfants anémiques et les femmes enceintes qui souffrent de complications pendant l’accouchement,” explique Abba Suleiman Muwaffaq, technicien de laboratoire à la banque du sang ALIMA de Monguno. “Ceci est particulièrement important en cas d’urgence médicale, lorsque le temps presse, car parfois il est difficile de trouver le type de sang dont le patient a besoin à temps pour le sauver.”
Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, à l’échelle mondiale, environ 70 000 femmes meurent chaque année d’hémorragie post-partum.
Malheureusement, de nombreuses personnes au Nigéria sont encore inquiètes par rapport au don de sang, ce qui contribue grandement aux faibles pratiques de don de sang. Cette appréhension est alimentée par des croyances religieuses, spirituelles et superstitieuses. Beaucoup craignent de tomber malade ou de mourir s’ils donnent du sang. De plus des rumeurs courent dans les camps que le don de sang rend les hommes impuissants. La plupart des gens n’acceptent de donner du sang que lorsqu’un membre de leur famille ou un ami proche a un besoin urgent de transfusion, ce qui rend difficile la constitution de stocks dans les hôpitaux et les cliniques. Quand on est dans une course contre la montre, la vie du patient est en danger.
Avant l’ouverture de la banque de sang, les équipes d’ALIMA, en partenariat avec les autorités sanitaires locales et les leaders communautaires, ont commencé à participer à des campagnes d’éducation publique dans les camps et au sein de groupes de personnes déplacées, qui consistent à expliquer, en plusieurs langues, l’importance du don de sang, le processus de don, et à dissiper les mythes sur le don du sang.
Grâce à ces campagnes de sensibilisation, à peu près 200 personnes ont donné du sang depuis l’ouverture de la banque de sang en mai 2018, et 43 d’entre elles sont devenues des donneurs de sang réguliers. Chaque donneur est examiné et son sang est testé pour s’assurer qu’il est en bonne santé. Et comme il n’y a pas d’électricité à Monguno, le sang est stocké dans des réfrigérateurs spéciaux alimentés 24 heures sur 24 par des générateurs, afin d’assurer une conservation adéquate.
“Il faut donner votre sang pour sauver des vies,” explique l’animateur de la jeunesse du camp de personnes déplacées à Monguno, Auwal, qui encourage publiquement les personnes, en particulier les jeunes, à donner du sang. Il rassure sa communauté : “Depuis que j’ai donné mon sang, je suis en pleine santé, je suis toujours fort.”
_____
ALIMA (The Alliance for International Medical Action) est une organisation médicale humanitaire qui travaille main dans la main avec un réseau d’organisations médicales locales pour fournir des soins médicaux de qualité aux personnes les plus vulnérables lors de situations d’urgence et de crises récurrentes. Basée à Dakar au Sénégal, ALIMA a traité plus de 3 millions de patients à travers 12 pays depuis sa création en 2009, et lancé 10 projets de recherche sur la malnutrition, le paludisme et le virus Ebola.
Au Nigeria, où ALIMA intervient depuis juillet 2016, des équipes médicales dirigent des dispensaires pour les personnes déplacées et les membres des communautés d’accueil à Muna et Monguno, où les enfants de moins de 5 ans reçoivent des soins de santé primaires et nutritionnels gratuits et une clinique mobile s’occupe de la communauté d’accueil de Bakassi. Les femmes enceintes bénéficient de soins pré- et post-natals gratuits, ainsi que d’accouchements assistés, à Monguno, dans le cadre d’un programme de santé sexuelle et reproductive. À l’hôpital universitaire de Maiduguri, ALIMA soutient un centre de nutrition thérapeutique de 30 lits et a mis en œuvre un programme de formation qui enseigne aux agents de santé à prendre en charge les enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère (SAM) présentant des complications.
En 2017, ALIMA a soigné plus de 11 000 enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère, effectué plus de 77 000 consultations et formé 23 000 mères à dépister la malnutrition chez leurs enfants en utilisant le bracelet MUAC.
La banque de sang et les autres activités opérationnelles à Monguno sont rendues possibles grâce au financement de l’OFDA / USAID, du département de la protection civile et de l’aide humanitaire de la commission européenne (ECHO) et de la délégation de l’Union Européenne (DUE).