« En République centrafricaine, le nombre de décès maternels est élevé. 48% des femmes accouchent à domicile, explique Mme Leonce KOUSSA, sage-femme point focal santé sexuelle et reproductive. Qui assiste ces accouchements à domicile ? »
En réponse à cette situation critique, ALIMA (The Alliance for International Medical Action) a collaboré avec le ministère de la Santé du pays pour lancer une étude pilote utilisant une application mobile destinée aux matrones.
Une technologie adaptée aux besoins locaux
« ALIMA travaille en partenariat avec le ministère de la Santé et c’est ensemble que nous avons décidé de mettre en place cette étude, détaille Dr Jérémie HIEN, responsable recherche du projet Wakobo Ti Kodro. L’idée, c’est que ces matrones puissent identifier les grossesses à risque et contribuer à leur suivi au niveau communautaire. »
Les matrones ont rapidement adopté cette technologie. « Au début, nous nous demandions si les matrones allaient accepter parce qu’elles travaillaient dans un système ‘clandestin’, mais elles ont accepté. On les a identifiées, on les a formées. Dès les premières formations, les matrones ont très vite maîtrisé la tablette », ajoute Dr HIEN.
Un impact tangible sur le terrain
« Auparavant, ces matrones villageoises n’étaient pas vraiment prises en compte par le système de santé, souligne M. Victorien VOMITIADE-ZEKEDE, chef du centre de santé de Sakaï. Ce projet leur permet également d’être référencées au niveau du centre. »
L’application mobile se distingue par son approche visuelle et auditive, essentielle dans une région où le taux d’alphabétisation est très faible. « Cette application est basée sur des images liées aux facteurs de risques [d’une grossesse]. Chaque facteur de risque est représenté sous forme d’un pictogramme auquel on associe un message vocal traduit en langue nationale », précise le Dr HIEN.
« Lorsqu’une femme enceinte est référée à un centre de santé, la sage-femme utilise un QR code pour accéder à son dossier et suivre son calendrier de soins. Quand la sage-femme reçoit la femme enceinte, elle va prendre le code qu’on lui a donné à domicile pour l’enregistrer. Quand on entre ces informations, on a le calendrier global de tout ce qui est planifié pour le suivi de cette femme », ajoute Dr HIEN.
Vers une adoption plus large
Le développement de cette application a été possible grâce à une collaboration avec le centre de recherche PAC-CI en Côte d’Ivoire. Actuellement, l’application est une propriété d’ALIMA, mais il est prévu de la rendre en accès libre open source si l’étude est concluante.
Le projet « Wakobo Ti Kodro » illustre comment une approche innovante et communautaire peut transformer les soins de santé maternelle dans des régions où l’accès à des soins de qualité est très difficile. Intégrer les matrones dans le système de santé formel permet non seulement de sauver des vies, mais également de renforcer la confiance et la collaboration au sein des communautés locales.
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